Le climat prend l’affiche : provoquer le changement par l’art

par —
Daphné et Alexis

Le 10 mai dernier, à l’occasion du Sommet Climat Montréal, Culture Montréal invitait le public à prendre part à un atelier intitulé Le climat prend l’affiche : provoquer le changement par l’art. Il s’agit de la première participation de Culture Montréal dans le cadre du Sommet Climat Montréal. 

Emmanuel Rondia du CRE-Montréal, coprésident de la commission culture et transition écologique de Culture Montréal, et Pierre-François Sempéré, directeur du développement stratégique et politique de Culture Montréal, ont commencé par une brève introduction de la commission et une mise en contexte de l’histoire de la relation complexe entre l’art et l’environnement. Le cœur de l’atelier était ensuite animé par le conteur François Lavallée.   

Daphné Le Templier et Alexis Curodeau-Codère, tous les deux membres de la commission, nous en font le récit, très personnel et volontairement imagé, en hommage au travail de François Lavallée, artiste de la parole, de l’imaginaire et de l’assemblée. 

Un raconteur d’histoires.  Autour d’une question. 

Quelle est la place de l’art dans la lutte contre les crises environnementales et les injustices climatiques? L’objectif était d’esquisser avec quelques volontaires une réponse à cette question.  

Après s’être présenté, François nous invite à quitter la disposition magistrale et enjoint les participants à le retrouver dans un cercle étroit dans un coin de la tente. Il tire vers lui un tabouret et nous regarde.  

Nous formions un groupe bigarré d’une vingtaine de personnes, réuni en un cercle autour du conteur. Des entrepreneurs, représentants de divers organismes, fonctionnaires sont assis, mêlés les uns aux autres. Curieux, ils observent François, cet homme sympathique et drôlement magnétique. 

Jouer de la mémoire et de l’imaginaire. Peut-être aussi du Ukulélé. 

En une phrase, il nous capture. Comme un sortilège, ses mots semblent nous amener dans un espace-temps alternatif. Les visages stoïques esquissent des sourires. Il nous prend de court en parlant de son enfance, nous transporte d’un endroit à un autre et le brouhaha du Sommet s’estompe, se plie soudain à ce nouveau récit. 

La friche, le boisé et les chiens (sous la tente le bruit de train qui passe). Le ruisseau. 

Fais flotter le radeau pour attraper des anguilles. 

Aller dans la vase en sédiment. 

Réactiver des couches de nos imaginaires. 

Les gestes des gens, la forme des voitures, la poussière du bitume, la coupe des vêtements racontent la même histoire à l’unisson, la ville raconte une histoire qu’on oublie à force d’y vivre chaque jour. François interrompt son conte et distribue aux participants crayons et feuilles blanches pour un exercice d’écriture automatique, chacun en silence. Il nous invite, inspirés que nous sommes par ses mots et par le fleuve devant nous, à raconter à notre tour. Sans qu’on le comprenne alors vraiment, il nous amène à articuler un contre récit.  

Une fois notre page remplie, il nous invite cette fois à tirer trois mots de cette rédaction inspirée : un nom, un verbe et un adjectif.  

Nous nous tournons ensuite vers la personne la plus proche de nous pour lui offrir nos trois mots, avant de bâtir ensemble des slogans. 

Le temps d’un atelier, dans une petite tente sur le grand quai du port de Montréal, le conteur se force à chanter à contre-courant de cet harmonieux monologue et, l’espace d’un conte, soudainement c’est le récit dominant qui sonne faux. En cercles, nous échangeons nos slogans, bribes de poésie politiquement chargées. Le sourire aux lèvres, nous sommes amusés mais surtout inspirés.  

Quel est le rôle de l’art, finalement? Peut-être de mettre en récit une lutte pour la faire résonner de sens et nous montrer ce qui, par contraste, est soudain insupportablement discordant.  

L’émotion est le cœur battant. Garder l’émotion comme une braise 

Petite craque de lumière dans le shack. 

L’atelier s’achève et le conteur est applaudi. Nos slogans gribouillés sur nos cartons, eux, seront exposés plus tard au cœur du Sommet Climat Montréal. En attendant, les gens discutent, les inconnus qui se sont offerts trois mots en échangent, cette fois, beaucoup plus.