Frédérique Côté : Finaliste au prix du CALQ — Œuvre de la relève à Montréal 2021

Filibuste, Frédérique Côté

par —
Culture Montréal

Le prix du CALQ – Œuvre de la relève à Montréal, est issu d’une collaboration entre le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ), gestionnaire du prix, et Culture Montréal, promoteur de l’appel de candidatures et de la cérémonie de remise. Encore une fois cette année, Covid oblige, nous avons été contraints d’annuler notre traditionnelle cérémonie de remise du prix. C’est donc à travers de courts entretiens que nous vous invitons à découvrir nos trois finalistes, trois femmes, pour l’année 2021. Le nom de la lauréate sera dévoilé le 23 février prochain.  

Assortie d’un montant de 10 000 $, cette récompense est décernée à un(e) artiste ou à un(e) écrivain(e) de la relève, pour souligner l’excellence d’une œuvre récente. La sélection est assurée par un jury composé de pairs réunis par le Conseil. 

Entretien avec l’autrice Frédérique Côté autour de son roman intitulé Filibuste

© Justine Latour

À l’intérieur de son premier roman, Filibuste Frédérique Côté met à l’honneur la voix des femmes, leurs histoires et leurs prises de parole au travers un fait divers ; celui de l’accident du père, qui ne prend jamais la parole à l’intérieur du roman. 

 

Nous avons l’habitude de désigner les nouvelles générations d’artistes par le terme « relève ». Littéralement, on peut entendre ce mot comme une génération qui prend la relève d’une autre. Est-ce que cela signifie quelque chose pour vous le fait d’être une artiste de la relève ? Vous considérez-vous comme tel ?

 

Quand mon livre est paru, j’ai senti un très bel accueil de la part d’autrices confirmées, un peu plus âgées que moi qui semblaient m’ouvrir la porte du milieu littéraire. Donc oui, pour moi il est très touchant de faire partie de la relève, de cette lignée de femmes autrices québécoises, autant au sein de ma maison d’édition que dans la littérature québécoise contemporaine en général.

 

Quel regard portez-vous, en tant qu’artiste de la relève, sur cette pandémie qui dure et ces moments d’interruption des activités causés par la crise sanitaire ? Quelles leçons pouvons-nous en tirer ?

Mon besoin de lire et de consommer de l’art s’est exacerbé pendant la pandémie. Tout comme celui de créer, je suis chanceuse. Ce grand temps d’arrêt a aussi tué l’art de plusieurs artistes et éreinté le milieu culturel déjà fragile. J’espère que les décideurs entendront raison et redonneront aux milieux touchés fatalement par la crise.

 

Vous travaillez dans le domaine de la postproduction, pouvez-vous établir des parallèles entre l’écriture d’un roman et la production audiovisuelle en ce qui a trait à la construction des personnages de Filibuste ?

La téléréalité est abordée dans Filibuste de façon assez documentaire. On peut dire que ma fascination pour le milieu de la télévision a servi de moteur et d’inspiration pour le livre. Le montage d’une téléréalité avec ses personnages et ses archétypes est finalement assez semblable à la construction d’un roman et si ce n’est pas nécessairement mon expérience de travail en télévision qui nourrit mon écriture, c’est absolument mon intérêt marqué pour la culture populaire.

 

Au départ, Filibuste prenait la forme d’une pièce de théâtre, mais vous avez plutôt choisi d’en faire un roman. Qu’est-ce qui a motivé le choix de ce genre littéraire ? Entrevoyez-vous la possibilité de revenir à votre première intuition et d’en faire une adaptation théâtrale ?

L’étincelle de départ de mon texte était mon désir de donner des voix réalistes à des personnages de femmes. Mon instinct premier était donc d’écrire du théâtre et de faire vivre ces femmes sur une scène. Même si le texte s’est transformé naturellement en roman depuis, j’ai toujours ce désir d’un jour écrire pour le théâtre et peut-être même de voir les femmes de Filibuste prendre vie sur scène.

 

Vous avez mentionné à l’intérieur d’une entrevue que les faits divers sont habituellement hyper-masculinisés, à l’inverse, vous avez choisi dans votre roman de donner la parole aux femmes. D’où vient cette fascination pour les faits divers ? Et qu’apporte une vision féminine de ce phénomène ?

Ma fascination pour le fait divers dure depuis des années, comme celle que j’entretiens pour les téléréalités. Pendant ma maîtrise, j’ai étudié l’utilisation du fait divers dans les œuvres d’Emmanuel Carrère. Comme les coupables, les auteurs et les journalistes du fait divers sont souvent des hommes, il s’agit d’un milieu très masculin qui relate souvent les histoires selon la perspective de celui qui cause le fait divers et non du point de vue de celles qui le subissent. Présenter une vision féminine du phénomène est primordial et permet de raconter les histoires des victimes collatérales, ces voix trop souvent oubliées.