L’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) est depuis plusieurs jours sous le feu des projecteurs. Dans cette tempête, il nous apparaît important de bien distinguer certaines pratiques de gestion discutables de l’organisation elle-même de son rôle important pour la démocratie montréalaise.
Il est tout à fait légitime de s’offusquer des pratiques des dirigeant.es de l’OCPM et de réclamer une exemplarité de leur part, dans un souci de saine gestion des finances publiques. Par contre, remettre en question la pertinence de l’institution et la fonction même de la consultation publique est un pas qu’il nous apparaît inacceptable de franchir.
Depuis sa création, l’OCPM joue en effet un rôle important et unique en permettant à l’ensemble de la société civile montréalaise de s’informer, voire s’éduquer par un accès aux études pour mieux de se prononcer sur les plans, les politiques, et sur les grands projets d’aménagement qui façonnent le visage de la métropole. Les consultations qu’elle organise sont des moments précieux pour la population et pour les organisations qui y participent. Ils sont l’occasion de poser des questions, proposer des idées, commenter des propositions et souvent pousser la Ville à faire preuve d’ambition et d’exemplarité.
Les pratiques de consultations développées à l’OCPM ont influencé la présence et la qualité des démarches de participation publique menées par les instances municipales et ont permis au fil des ans, le passage d’une culture d’affrontement sur les visions du développement urbain à une culture, certes imparfaite, de dialogue et d’échanges. Bien sûr, il y a toujours place à l’optimisation des processus et des outils ainsi que des mécanismes de suivi afin de développer encore plus cette culture de l’échange.
L’apport de l’Office va au-delà de l’adoption ou non des recommandations par l’administration, bien qu’il s’agisse d’un indicateur à considérer. Les retombées pour les Montréalais.es sont multiples et diverses selon le projet ou la thématique abordée. Les discussions qu’engendrent les consultations font cheminer la réflexion tant en amont qu’en aval du dépôt des rapports. Elles favorisent l’appropriation des dossiers par la société civile et permettent d’éclairer les décideurs sur les attentes et les aspirations de la population et donc de bonifier les plans, politiques et projets.
Au cours des dernières années, plusieurs consultations ont été marquantes. Pensons à la participation record lors de la récente consultation Réflexion 2050 sur le Projet de Ville, à la mobilisation en amont de l’élaboration du Plan directeur du Parc Jean-Drapeau, aux débats intenses et constructifs autour de la vision d’accessibilité au Mont-Royal, ou celle autour de l’avenir du secteur de Pierrefonds-Ouest qui a posé les bases du Grand parc de l’Ouest. Sans compter les démarches comme la consultation sur le racisme et la discrimination systémiques, autour d’enjeux qui cultivent le vivre-ensemble montréalais, ou celle sur la réduction des énergies fossiles, prélude à un changement de cap en matière de mobilisation en matière de lutte à la dépendance aux hydrocarbures.
C’est pourquoi, au-delà de la reconnaissance de l’importance de cette instance unique, il est urgent également de revaloriser son rôle auprès des autorités administratives et politiques. Les travaux de l’OCPM stimulent l’intelligence collective et constituent la voix de la société civile. Comment, dans une démocratie comme la nôtre, est-il possible de se priver d’un tel apport?
Bref, dans toute cette tourmente, il nous apparaît nécessaire d’éviter tout raccourci entre les décisions déconnectées de quelques personnes et la pertinence de cette institution démocratique qui, depuis plus de 20 ans, encadre de manière constructive la liberté d’expression et la participation au dialogue collectif.
Signataires :
- Emmanuel Rondia, directeur général, Conseil régional de l’environnement de Montréal
- Louise Harel, députée 1981-2008 et ministre des Affaires municipales et de la Métropole 1998-2002
- Véronique Fournier, directrice générale, Centre d’écologie urbaine de Montréal et ex-conseillère de ville 2009-2013
- François William Croteau, directeur général, IRIU, ancien maire de Rosemont-La Petite-Patrie 2009-2021
- Ron Rayside, Rayside-Labossière
- Yves Bellavance, coordonnateur, Coalition montréalaise des Tables de quartier
- Hélène Panaïoti, codirectrice générale, Les Amis de la montagne
- Patricia Clermont, coordonnatrice, Association québécoise des médecins pour l’environnement (AQME)
- Moridja Kitenge Banza et Emmanuelle Hébert, président et directrice générale, Culture Montréal
- Linda Collette, membre cofondatrice, Les Amis du Quai de l’Horloge
- Victor Balsis, président, AmiEs du courant Sainte-Marie
- Florence Paulhiac, professeure au département d’études urbaines et touristiques, Université du Québec à Montréal
- Christine Caron, administratrice, Association des résidants du Vieux-Montréal
- Dinu Bumbaru, directeur des politiques, Héritage Montréal
- Malorie Flon, directrice générale, Institut du Nouveau Monde
- Christian Savard, directeur général, Vivre en Ville